On sait qu’il faut boire, mais on mesure rarement à quel point c’est vital, notamment pour la santé des reins. Ces organes discrets mais essentiels filtrent chaque jour des dizaines de litres de sang pour éliminer les toxines, les excès de minéraux et les déchets azotés. Sans une bonne hydratation, ce système peut se dérégler très vite. Et quand la machine s’enraye, les conséquences peuvent être sérieuses, voire irréversibles si rien n’est fait à temps. Voyons comment le manque d’eau affecte vos organes, quels sont les indicateurs d’alerte, les personnes les plus exposées, et surtout les bonnes pratiques à adopter pour prévenir tout dysfonctionnement, qu’il soit ponctuel ou chronique.
Pourquoi les reins ont besoin d’eau pour bien fonctionner ?
Les reins jouent un rôle fondamental dans l’équilibre général. Ils filtrent environ 180 litres de fluide par jour, dont une infime partie (1 à 2 litres) est évacuée sous forme d’urine. Cette filtration permet de contrôler le volume circulant, d’éliminer les déchets métaboliques. Elle va également aider à maintenir la bonne proportion de minéraux dans l’organisme, notamment le sodium, le potassium et le magnésium, et de réguler la tension sanguine à un niveau compatible avec le bien-être cardiovasculaire.
Mais pour cela, les reins ont besoin d’un apport suffisant et constant. Lorsque le corps est bien hydraté, ils peuvent diluer les substances toxiques et assurer une activité rénale optimale. À l’inverse, un déficit en eau rend leur travail plus difficile, perturbe la masse sanguine et les oblige donc à concentrer l’urine, ce qui va augmenter la probabilité de cristaux urinaires, voire de calculs.

Que se passe-t-il dans le corps en cas de déshydratation ?
En cas de manque d’eau, l’état général entre en alerte. C'est-à-dire que la teneur de substance aqueuse circulant diminue, le fluide devient alors plus concentré, et la pression vasculaire peut baisser. Cela provoque un ralentissement de la circulation, notamment au niveau des organes vitaux, dont le cerveau.
Les urines deviennent plus foncées, plus odorantes, et moins abondantes. L’ensemble corporel tente de conserver ce qu’il lui reste, mais cela se fait au détriment de l’élimination efficace des déchets. Peu à peu, cette situation de sous-équilibre en eau perturbe le métabolisme global, ralentit le fonctionnement cellulaire et fragilise les défenses naturelles.
La mesure d’électrolytes dans le plasma peut chuter ou au contraire s’élever, en particulier le sodium, provoquant une sensation de fatigue, de confusion ou des manifestations musculaires. Un déséquilibre modéré devient alors un désordre pathologique si l’équilibre en eau n’est pas rapidement corrigé.
Insuffisance rénale aiguë : une conséquence grave mais évitable
Définition et fonctionnement
L’insuffisance rénale aiguë est un trouble qui se manifeste lorsque les reins cessent brutalement de fonctionner correctement. Cette altération brutale compromet l’élimination des déchets azotés, la régulation des électrolytes (sodium, potassium, calcium…) ainsi que le maintien de l’équilibre hydrique de l’organisme. Le corps, privé de cette régulation vitale, accumule alors des toxines, des liquides et des minéraux en excès, ce qui peut entraîner un déséquilibre profond du métabolisme interne.
Les 3 types d’IRA
L’une des causes principales, est une chute du débit rénal, souvent liée à une déshydratation sévère (vomissements, diarrhées, forte transpiration, fièvre non compensée). C’est ce qu’on appelle une cause pré-rénale.
Les autres causes sont dites rénales : lésion directe de l’appareil rénal par une infection, une inflammation ou un médicament néphrotoxique, ou post-rénales : obstruction, par exemple par un calcul urinaire ou une compression.
Ce type de trouble peut provoquer une condition générale très altérée, avec une baisse de la vigilance, des nausées, un ralentissement cognitif, un déséquilibre électrolytique sévère, voire un coma. Mais bonne nouvelle : si elle est identifiée rapidement et prise en charge à temps, cette pathologie est souvent réversible et sans séquelles pour le patient.
Qui est le plus à risque en cas de déshydratation ?
Tout le monde peut connaître un état de déshydratation, mais certaines personnes sont plus exposées à ses effets.
Public concerné |
Facteurs de risque |
Conséquences |
Enfants |
- Surface corporelle plus grande par rapport à leur poids - Perte de fluides rapide - Mécanismes de régulation pas encore matures - Fièvre ou gastro-entérite fréquentes |
Effets immédiats parfois difficiles à détecter |
Personnes âgées |
- Sensation de soif diminuée - Boivent donc moins souvent - Fonctionnement des reins souvent diminuée - Prise de médicaments (diurétiques, antihypertenseurs, laxatifs) |
Augmentation de la probabilité de déshydratation |
Patients avec maladies chroniques (cœur, foie, reins) |
- Besoin d’une adaptation précise des apports hydriques |
Potentiel déséquilibre général, y compris nutritionnel |
Patients ayant un cancer |
- Effets secondaires comme des vomissements, nausées dues au cancer - Perte d’appétit - Chimiothérapie |
Déshydratation probable, impact direct sur les reins déjà fragilisés |
Sportifs d’endurance / Travailleurs en extérieur |
- Perte rapide de fluides et de minéraux par la sueur - Conditions chaudes - Absence de réhydratation immédiate |
Menace importante sur le fonctionnement rénal si la réhydratation est retardée |
Symptômes à surveiller : quand s’inquiéter ?
Il est essentiel d’apprendre à reconnaître les manifestations d’un début de déshydratation qui pourrait nuire à la capacité rénale.
Les signes les plus fréquents sont : urines foncées ou peu abondantes, sensation de bouche sèche intense, fatigue soudaine, maux de tête, vertiges, crampes musculaires, digestifs, voire confusion ou désorientation passagère.
Chez l’enfant, un amaigrissement rapide, une somnolence excessive, un teint grisâtre ou un comportement inhabituel sont des indicateurs à ne jamais négliger.
Chez la personne âgée, un affaiblissement général, une chute inexpliquée ou une perte d’équilibre peuvent signaler un manque important.
Comment diagnostiquer une insuffisance rénale aiguë liée à la déshydratation ?
En cas de doute, le médecin peut prescrire un bilan sanguin pour mesurer le taux de créatinine, d’urée et d’électrolytes. Ces paramètres indiquent le rôle des reins à filtrer et à réguler l’équilibre en fluides.
Ce bilan est généralement complété par une analyse d’urine, qui peut révéler une concentration accrue, la présence de protéines (protéinurie), de sang (hématurie) ou d’autres anomalies urinaires caractéristiques.
De plus, une échographie rénale peut être réalisée et permet de vérifier la taille, la contenance, l’irrigation et la condition du rein, ainsi que l’absence d’obstruction sur les voies.
Les recommandations disponibles dans les bases de référence comme le Vidal, rappellent également la nécessité d’une réhydratation adaptée, d’un suivi rigoureux et d’une gestion personnalisée pour chaque patient, selon ses antécédents, traitements en cours et le contexte général.
Quelles sont les complications possibles ?

Si rien n’est fait, la déshydratation peut entraîner des séquelles durables. Une forme sévère mal traitée peut alors évoluer vers une chronique, ce qui signifie une perte progressive et irréversible de la fonction rénale.
Cela oblige à adapter l’alimentation, la gestion des liquides, et parfois même à envisager une dialyse, voire une transplantation.
D’autres effets peuvent apparaître : baisse de la tension artérielle, troubles cardiovasculaires, œdèmes, du rythme cardiaque, altération cognitive, et déséquilibres ioniques comme une hypernatrémie ou une hyponatrémie, c’est-à-dire un excès ou un manque de sodium dans l’organisme.
Dans les cas les plus extrêmes, cela peut conduire à une hospitalisation d'urgence, voire à une mise sous dialyse immédiate.
Prévenir les problèmes rénaux liés à la déshydratation
La première règle est simple : boire régulièrement. Pas besoin d’attendre un besoin hydrique marqué pour s’hydrater. En moyenne, un adulte a besoin de 1,6 à 2 litres de liquide par jour, selon son activité, la température ambiante et sa condition.
Il est aussi important de répartir votre apport tout au long de la journée, et de privilégier ce type de boisson. Les boissons très sucrées ou caféinées peuvent parfois accentuer les pertes ou masquer une réelle soif.
Dans certaines situations (maladie, sport, canicule, altitude, voyage), il faut augmenter ses apports. En cas de doute, ajustez votre consommation en observant la couleur de vos urines : si elles sont très claires, c'est bon signe.
Surveillez aussi la quantité d’urine produite, votre poids, votre tension artérielle, votre fréquence cardiaque, votre niveau de forme général, et demandez l’avis d’un professionnel du secteur médical en cas de doute ou de symptômes inhabituels.
En résumé : l’eau, le meilleur allié de vos reins
La santé rénale dépend en grande partie de votre apport hydrique. Boire suffisamment est un geste simple, quotidien, mais essentiel pour éviter des déséquilibres qui peuvent devenir graves.
Vos reins vous accompagnent silencieusement toute votre vie : autant les soutenir en leur donnant ce dont ils ont besoin. Équilibre, écoute de soi et vigilance suffisent souvent à ce type de problèmes vitaux.
Ne sous-estimez jamais les effets du manque. Votre énergie et votre bien-être en dépendent.
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